Titre du projet :
Porteur·e :
QUINZ EMANUELE |
Courrier électronique :
equinz@univ-paris8.fr |
Adresse :
96 Rue Robespierre 93100 Montreuil |
Téléphone :
0670271933 |
Statut :
PR |
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Institution du porteur·se du projet :
Université Paris 8 (UP8) |
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CV du porteur·se de projet :
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Biographie du porteur·se de projet :
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Institution partenaire | Laboratoire | Lettre d’engagement |
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Centre Georges Pompidou | Lettre-soutien_Centre-Pompidou_Design_laboratoire-critique.pdf |
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Ecole nationale supérieure des Arts Décoratifs (ENSAD) | Lettre-soutien_Ensad_Design_laboratoire-critique.pdf |
NOM et Prénom | Institution – Statut |
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DE SMET CATHERINE | Université Paris 8 Statut : PR |
- La création comme activité de recherche
- Quelle est la durée du projet : 1 AN
Le projet vise à composer un « portrait » du design en tant que recherche, à en saisir les multiples facettes, et à prendre ainsi la mesure de sa dimension spéculative : le design comme laboratoire critique interrogeant les enjeux sociaux et écologiques actuels. Enquête en plusieurs étapes, il comprend un séminaire en partenariat avec le Centre Pompidou, qui réunira des expert·es pour réfléchir à la définition du design, aux convergences avec le design graphique et l’art contemporain, tout en proposant une « bibliothèque idéale » qui s’enrichira au fil des débats ; une journée d’étude dédiée à T. Maldonado, pionnier de la pensée écologique, en partenariat avec l’Ensad, et une autre autour de la pluralisation des histoires du design. Un journal expérimental et des publications en ligne faciliteront la diffusion des idées et la participation collective. Le projet accompagne le lancement du parcours de Master Histoire et critique du design (HCD) dans notre université.
La définition du design est historiquement associée à l’idée de progrès technique et social. En maîtrisant la technique et en produisant objets ou environnements, le design s’est affirmé comme un vecteur privilégié d’amélioration des conditions de vie. Héritée des enseignements du Bauhaus et de l’École d’Ulm, cette conception voit comme une activité industrielle équilibrant forme et fonction. Toutefois, depuis les années 1960, cette vision a été remise en question en réponse aux préoccupations écologiques et sociales croissantes. Le design a franchi ses frontières disciplinaires, devenant un champ d’investigation pluridisciplinaire qui va au-delà de la simple production matérielle. À première vue, le design paraît sous-théorisé et peu présent dans le cadre académique, mais cette impression est trompeuse. Des penseurs comme Roland Barthes, Jean Baudrillard ou Tomás Maldonado ont développé des critiques des modes de production industrielle et de la société de consommation, inscrivant le design dans le projet de la modernité tout en remettant en cause ses implications idéologiques. Ce tournant critique est accentué dans les années 1970 par des figures comme Victor Papanek, qui redéfinit le design comme une activité de transformation sociale accessible à tous. Ces travaux ont marqué l’émergence du design social et éco-responsable, influençant les générations suivantes de chercheurs et praticiens. Dans les décennies qui suivent, le design s’ouvre à des domaines toujours plus variés. Cette expansion rend la définition du champ disciplinaire plus complexe et parfois conflictuelle : si d’une part, avec l’avènement du Human-Centred Design et du Design Thinking dans les années 1990 le design s’installe comme une méthodologie universelle de résolution de problèmes au service de la culture de l’innovation et du marketing, de l’autre l’émergence des pratiques spéculatives et critiques (Dunne, Raby 2013 ; Dautrey, Quinz 2014 ; Malpass 2017 ; Mareis, Renner, Greiner-Petter, Zeller 2022 ; Wizinsky 2022), influencées par le contre-design des années 1970, déplacent l’attention des objets matériels vers les comportements sociaux et les dynamiques de pouvoir sous-jacentes à l’extension du design. Des chercheurs comme Arturo Escobar, avec Designs for the Pluriverse (2018), Tony Fry, ou Anne-Marie Willis, ont largement contribué à cette reconfiguration du terrain théorique. Ces approches permettent de recentrer le design sur des enjeux de transition, de résilience et de réparation face à la crise environnementale, tout en redéfinissant ses objectifs éthiques. En même temps, le paradigme critique se décline dans une multitude de perspectives, qui empiètent sur le terrain de l’activisme et des médias tactiques : de la Critical Technical Practice (Agre 1997) aux Values in Design (Flanagan, Nissenbaum 2016), de l’Adversarial Design (DiSalvo 2012) au Contestable Design (Catts, Zurr 2018). Cette prolifération d’étiquettes est le symptôme à la fois de la fragmentation instable que subit le domaine, et d’une intense mobilisation pour la redéfinition du design comme un véritable laboratoire d’analyse, de critique et de préconisation, au-delà des catégories académiques ou institutionnelles. Même si, formellement, le design reste une activité appliquée, dans les différentes déclinaisons du design critique, son mandat social est remis en question : la stratégie d’action apparaît de moins en moins directe (en tant qu’instrument d’innovation), et de plus en plus indirecte (en tant que critique de l’innovation).
En partant de cette perspective élargie, à travers un séminaire et deux journées d’étude, le projet vise à engager une réflexion sur la pluralisation des définitions du design et de son historiographie. Loin d’une histoire linéaire ou technocentrée, le design est exploré comme un champ aux multiples narrations, où des points de vue féministes, décoloniaux et écologiques s’entrecroisent pour proposer de nouveaux paradigmes. Aujourd’hui, face aux défis d’un monde en crise, un des enjeux majeurs pour le design est de redéfinir ses contours et ses histoires. Cette pluralisation des récits exige de considérer le design non plus uniquement comme une discipline tournée vers l’industrie, mais comme un véritable laboratoire critique capable d’interroger les systèmes sociaux, politiques et écologiques dans lesquels il opère. Ainsi le projet de recherche « Design comme laboratoire critique » propose une analyse des évolutions théoriques et pratiques du design aujourd’hui tout en explorant son potentiel de transformation sociale et environnementale.
Le projet se construit, de manière empirique, comme une enquête en plusieurs étapes, visant à composer un «portrait » du design actuel afin d’en saisir les multiples facettes, et de prendre la mesure de sa dimension spéculative : le design en tant que recherche. Le projet accompagne l’ouverture, au sein de notre université, d’un nouveau parcours de Master dédié au design en 2025.
Conçu comme une enquête en plusieurs étapes, le projet s’articule autour d’un séminaire et deux journées d’étude.
Le séminaire (février-avril 2025), développé en partenariat avec le Centre Pompidou (Bibliothèque Kandinsky et MNAM/Département de design et prospective industrielle), avec la participation active des doctorant.es en design, vise deux objectifs : il essaiera d’une part de composer, à travers un programme d’invitation de personnalités choisies pour l’originalité de leur travail, un portrait du design actuel et de l’autre de poser les bases d’une « bibliothèque idéale ». En explorant avec les intervenant/es (théoricien.ne.s, historien.ne.s, praticien/ennes, curateur/trices, etc.) tour à tour les connexions entre les paradigmes conceptuels de l’art contemporain, les historiographies du design graphique, la question de la documentation et des archives, les reconfigurations actuelles de la pensée écologiste et du vivant, il s’agira de dresser une première cartographie du design à la fois comme terrain et dispositif de recherche. Cette démarche élargie permettra de dessiner le périmètre théorique et culturel complexe dans lequel des définitions instables se construisent, tout en questionnant la capacité du design à infiltrer et transformer l’horizon du social. Les mêmes intervenant/es seront sollicités pour proposer des ouvrages et argumenter leur choix, contribuant à une bibliographie raisonnée et subjective destinée à s’enrichir progressivement et à constituer un fondement partagé pour le Master. Toutes ces « notes d’auteur » seront incluses dans un journal, réalisé avec les étudiant/es et ensuite mises en ligne, sur le site du nouveau master HCD, avec possibilité d’augmentation par fil de commentaires et ajout de références.
Deux journées d’étude viendront prolonger ces réflexions en s’adressant à un public plus large.
La première journée (Avril 2025) sera consacrée à Tomás Maldonado, figure pionnière d’une réflexion écologique et critique sur les relations entre design et technologies, ancien directeur de la Hochschule für Gestaltung d’Ulm, l’un des premiers à avoir pensé le design comme un dispositif de recherche. L’événement, qui marquera la publication d’une édition critique des essais de l’auteur sous notre direction scientifique, se tiendra en partenariat avec l’EnsAD, en résonance avec son programme Design des territoires. Ce programme pourra s’inspirer des propositions de Maldonado autour d’un design des milieux, offrant une lecture contemporaine et élargie de son approche critique et écologique du design. Afin d’ajouter une dimension internationale à l’initiative, une collaboration avec des institutions internationales telles que l’IUAV de Venise et le Politecnico de Milan et la Fondation Feltrinelli est également envisagée, L’objectif n’est pas seulement de contribuer à introduire cette pensée largement méconnue en France, mais de montrer en quoi elle peut nourrir cet observatoire expérimental des mutations sociales et écologiques que devient le design aujourd’hui.
La seconde journée (Mai 2025) s’articulera autour de la question de l’histoire du design et de sa mise en perspective. Quelle histoire pour le design ? Il est impératif de reconsidérer les récits établis pour révéler les points de bifurcation, où la tension critique fait émerger des visions alternatives du design. Si l’épopée du design comme instrument de la modernité et du progrès éclairé dissimule des zones d’ombre nécessitant une déconstruction radicale, il est tout aussi urgent de mettre en lumière d’autres généalogies et histoires encore inexplorées. Une attention particulière sera portée à l’inclusion du design graphique dans cette reconfiguration des récits historiques.
En appliquant donc une approche résolument interdisciplinaire, la recherche souhaite mettre en évidence des épisodes historiques révélateurs de la persistance d’une attitude critique interne au design, d’une « condition de recherche », contribuant à redéfinir ses frontières et son impact.
Le partenariat du Centre Pompidou, qui accueillera plusieurs séances de séminaire, offrira la possibilité d’une approche concrète à travers l’expérience des conservateurs/trices, en matière d’acquisition, de traitement et d’exposition des collections et archives de design, et des enjeux théoriques attachés à ces activités muséales.
Les différentes activités se développeront autour d’une réflexion large sur les frontières mouvantes du design, et seront accompagnées d’un travail de documentation et d’éditorialisation favorisant une diffusion au-delà du milieu académique et institutionnel : un journal, élaboré par les doctorant.es et étudiant.es avec la coordination d’un.e IGE, accompagnera chaque étape (séminaire et journées d’étude), et des publications en ligne constitueront des espaces de partage et de discussion collective, renforçant ainsi la dimension collaborative du projet.
Le projet se structure autour de plusieurs publications, chacune contribuant à enrichir et approfondir les réflexions critiques sur le design contemporain. Associée au projet, l’édition critique de l’œuvre majeure de Tomás Maldonado, La speranza progettuale (1970, en français Vers une écologie critique), sera publiée dans la collection Design/Théories des Presses du Réel, par nos soins. Cette nouvelle traduction s’accompagne d’une présentation de documents inédits, en partenariat avec l’archive Maldonado de la Fondation Feltrinelli de Milan. Le soutien d’Artec permettra d’organiser, lors de sa publication, une journée d’études consacrée à Maldonado, pionnier de l’engagement social et écologique. Afin d’élargir le débat autour de sa pensée, un dossier sera publié sur la plateforme Problemata (http://problemata.org/fr/). Ce dossier inclura des archives ainsi que des « réactions » actuelles de chercheur·es et designers aux propositions de Maldonado sur un design des milieux.
Le séminaire et la deuxième journée d’études consacrée aux Histoires du design aboutiront à l’édition d’un Journal conçu par les doctorant·es et coordonné par un IGE, avec une éditorialisation et un graphisme d’approche expérimentale. Ce Journal reflétera l’esprit du séminaire, dont l’objectif principal est de poser les bases d’une « bibliothèque idéale ». Les discussions porteront sur les liens entre l’art contemporain, les historiographies du design graphique, la gestion des archives et de la documentation, ainsi que les transformations actuelles de la pensée écologique et du vivant, afin de dresser un « portrait » du design comme terrain d’investigation et dispositif de recherche.
Pour renforcer la dimension internationale du projet et encourager les échanges avec d’autres partenaires académiques et professionnels étrangers, les textes seront également publiés en anglais et disponibles en libre accès sur le site du Master HCD, contribuant ainsi à la diffusion ouverte des savoirs.
Le projet vise la production de données de recherche sous différentes formes : la publication de textes imprimés et en ligne. Associée à la traduction en français et l’édition critique de l’œuvre majeure de Tomás Maldonado, réalisée par nos soins, le projet prévoit la publication sur la plateforme en ligne Problemata, de documents inédits (correspondances avec des designers, notes de cours, etc.), en collaboration avec l’archive Maldonado de la Fondation Feltrinelli à Milan. Ces documents constituent un apport précieux pour la recherche contemporaine sur le design, en offrant une nouvelle lecture de ses propositions pionnières sur l’écologie et le design social. À ces textes s’ajouteront sur la même plateforme, dans un dossier spécial, des commentaires et des textes critiques d’auteurs contemporains en réaction à ces écrits, dans le but de créer un dialogue vivant autour de la pensée de Maldonado.
En outre, un journal expérimental, conçu par les doctorant·es, relatera les séminaires, la deuxième journée d’étude et discussions tenus dans le cadre du projet, et inclura la « bibliothèque idéale », élaborée avec les intervenant·es pour offrir une réflexion approfondie sur les enjeux du design contemporain et de ses historiographies.
Ce journal, diffusé gratuitement, sera ensuite disponible en ligne sur le site du master HCD, permettant ainsi un accès ouvert à tous les contenus produits.
La diffusion de ces données ne se limitera pas à un public francophone : les publications seront également disponibles en anglais, facilitant ainsi les échanges avec la communauté internationale de la recherche. L’objectif est de permettre une plus large circulation des savoirs et de stimuler la réflexion critique au-delà des frontières académiques, tout en renforçant la collaboration entre chercheurs, designers et institutions à l’échelle internationale.
Le projet s’articule autour de plusieurs événements et contenus de valorisation, visant à enrichir et diffuser les réflexions critiques sur le design contemporain. Un séminaire, prévu entre février et avril 2025, sera organisé en partenariat avec le Centre Pompidou. Ce séminaire inclura des intervenants de renom et impliquera activement les doctorant·es en design, avec pour objectif de composer un portrait actuel du design tout en posant les bases d’une « bibliothèque idéale ».
La diffusion des résultats de ce séminaire se fera par le biais d’un journal distribué gratuitement, et ensuite accessible en ligne sur le site du nouveau master HCD, permettant une large circulation des idées. Ce journal sera conçu en collaboration avec les étudiant·es et intégrera des contributions des intervenants, enrichissant ainsi le débat autour des thématiques abordées.
Deux journées d’étude compléteront cette démarche. La première, consacrée à Tomás Maldonado, marquera la publication d’une édition critique de son volume Vers une écologie critique. Ce texte entend s’imposer comme un ouvrage de référence et un point de tournant théorique encore méconnu, renforçant la réflexion sur le design comme dispositif de recherche et comme laboratoire critique face à une société en mutation. La journée d’études mettra en lumière cette approche, tandis que les publications sur la plateforme de recherche en ligne Problemata ajouteront du poids au projet, étendant non seulement les contributions, mais également le public impliqué.
La seconde journée sera consacrée aux « histoires du design », en remettant en question les récits établis et en éclairant des perspectives alternatives. Elle intégrera des approches plurielles, notamment écologiques, critiques, féministes et décoloniales, tout en établissant des convergences avec les sciences sociales et en approfondissant la thématique du design graphique. Ces événements constitueront une plateforme de dialogue interdisciplinaire, favorisant l’échange de connaissances dans et au-delà du cadre d’ArTeC. Une présentation de ces démarches sera possible dans le cadre des journées ArTeC, où il sera possible aussi de distribuer le journal produit à la suite des manifestations liées au projet. Pour garantir un accès à ces contenus, des traductions en anglais seront réalisées, permettant ainsi de toucher un public international. L’objectif est de créer un réseau de chercheurs, designers et institutions académiques qui bénéficiera des réflexions produites et participera activement à l’enrichissement des discussions sur le design contemporain et ses enjeux sociaux et écologiques.