Je suis très intéressée par la réflexion sur les stratégies plastiques et sensibles dont dispose le cinéma pour représenter les affects et les sensations psychiques et physiques que nous éprouvons lorsque nous naviguons sur internet. Je pense qu’il y a beaucoup à explorer dans ce sens, comme si, pour une étrange raison, le cinéma avait du mal à figurer ou à donner à sentir internet. Lorsque j’ai commencé le projet, je voulais que l’expérience du film ressemble à celle que je vis en tant qu’internaute : le saut constant entre des contenus qui ont des liens souvent opaques entre eux, la disruption des notifications, le bond entre diverses applications et plateformes, entre des régimes d’images très hétérogènes et des textes, des chiffres, des icônes, des gifs… Toute cette densité sémiotique de l’expérience internet me paraît parfois proche d’une transe hypnotique, débordante et écrasante du fait de l’extension du « domaine de la lutte » (pour citer l’écrivain le plus incel que je connaisse).
Gala Hernández López
(entretien avec Gabriel Bortzmeyer, Debordements.fr, janvier 2023)