Haraka, Jérémie Nicolas

Exemple d'édition
Création : Jérémie Nicolas
Scénographie : Maryline Gillos
Métallurgie : Lou Force
Image : Cécile Friedmann
Le lieu de création : Maison des Sciences de l’Homme Paris-Nord

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« Haraka » signifie mouvement en arabe. De ce terme proviennent les mots « harki », un supplétif algérien de l’armée française durant la guerre d’indépendance algérienne, et « harka », la formation de supplétifs, le groupe mobile. Pièce maîtresse d’une thèse en recherche-création intitulée Écho d’affect d’effroiHaraka est une installation sonore pour un dispositif cylindrique d’occlusion. Si l’archive des témoignages oraux révèle le ton avec lequel s’articule une parole, ces documents sonores donnent également à entendre les silences de voix, parfois longs et sans issue, qui ponctuent un témoignage. À partir d’une série d’entretiens, menés par Grégor Mathias avec d’anciens supplétifs et conservés dans la phonothèque de Véronique Ginouvès à la Maison Méditerranéenne des Sciences de l’Homme d’Aix-en-Provence, il s’agit de questionner le potentiel audible des silences liés à une mémoire traumatique. Dans l’histoire du trauma colonial algérien, la question des harkis reste une des plus complexes et contradictoires. Rejoignant souvent les rangs de l’armée française pour des raisons financières, les harkis ont été considérés comme des traitres sur le sol algérien et ceux qui ont suivi la France ont été trahis, parqués avec leurs familles dans des camps de transit et de reclassement, parfois jusqu’au milieu des années 1970.

Constitué de neuf feuilles d’acier, le dispositif d’occlusion a pour fonction de rendre sensible l’épreuve difficile que représente l’écoute d’un mouvement pourtant toujours en potentiel dans un silence de voix. Dans un enregistrement, une plage de silence peut être considérée comme un bruit de fond à spectre continu. La résistance du silence à la représentation est matériellement comprise dans le silence enregistré. À l’inverse d’un vide, il apparaît comme un potentiel en excès, une sonorité proche du bruit blanc qui comporte toutes les fréquences audibles à intensité égale et dans laquelle tout, a priori, pourrait être composé.

À intervalle irrégulier, une question est diffusée du plafond. Immédiatement après, les parois du cylindre occlusif sont activées par six excitateurs diffusant, à travers l’acier, des moments musicaux composés à partir de silences d’anciens supplétifs. La particularité du dispositif est due aux écarts infra minces des zones de recouvrement des feuilles entre elles, qui, laissant passer un peu d’air, réagissent avec plus ou moins d’expression en fonction des sonorités diffusées. Continuellement redoublé de résonances incidentes pouvant aller du râle au cri, le dispositif feint les modalités d’une voix partiellement autonome agissant comme une silenciation de la source, alors inaudible en tant que telle.

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Artiste-chercheur associé à la Maison des Sciences de l’Homme Paris-Nord, doctorant en recherche-création musique et enseignant à Paris 8 (Musidanse/CICM), Jérémie Nicolas vit et travaille à Paris. Sa thèse débutée en 2019, intitulée Écho d’affect d’effroi et menée sous la direction d’Anne Sèdes (codirection Joseph Delaplace), est encadrée par un contrat doctoral de l’EDESTA. En 2021 son projet d’installation sonore Haraka reçoit l’aide à la création ArTeC. Accueillie à la MSH P.-N., cette pièce fait l’objet d’une Visite insolite du CNRS la même année dans le cadre de la Fête de la science. Par ailleurs il collabore depuis 2015 avec les arts plastiques et vivants, pour des projets réalisés à la maison des arts de Malakoff, au CENTQUATRE ou au Centre Pompidou.