EDITO
MIP ! Cet acronyme un peu bizarre semble l’onomatopée d’un son électronique. Bienvenue dans notre comic strip, alors, comme le disait Serge Gainsbourg (SHEBAM ! POW ! BLOP !
WIZZ !) ? Pas tout à fait, car MIP est depuis quelques années un terme devenu familier aux membres de la communauté ArTeC, en servant à désigner des espaces d’expérimentation
bien tangibles. MIP ! MIP ! MIP ! : et nous voilà aussitôt lancés sur la voie de la recherche-création !
Les MIP, ce sont bien sûr les Modules d’Innovation Pédagogique. Ils forment le point de rencontre le plus direct et le plus concret entre le master ArTeC et les très nombreux
masters associés à notre École Universitaire de Recherche, qui entamera en septembre 2022 sa cinquième année d’existence.
Fruits d’un appel à projets annuel, les MIP sont en effet proposés et portés par les masters de plusieurs établissements (l’université Paris 8, l’université Paris Nanterre, l’ENS Louis
Lumière, INA-Ecole nationale des chartes PSL-ENS Paris Saclay). De nouveaux masters de l’université Paris Nanterre ont d’ailleurs rejoint le consortium ArTeC au cours de l’année
universitaire 2021-2022, élargissant ainsi le périmètre des disciplines intégrées à l’EUR : le master « Histoire de l’art », rattaché à l’UFR SSA, les masters « Psychologie sociale,
du travail et des organisations », « Psychologie clinique, psychopathologie et psychologie de la santé » et « Sciences de l’éducation » de l’UFR SPSE. Ouverts aussi bien aux étudiant·es
des masters associés qu’aux étudiant·es du master ArTeC, les MIP permettent des rencontres et des collaborations souvent très dynamiques et productives sur le plan humain, intellectuel
et artistique entre étudiant·es, enseignant·es-chercheur·es, chercheur·es et artistes venant de domaines très différents.
Les MIP se déclinent sous différents formats – atelier laboratoire ou d’expérimentation, classe partagée à l’international, cycle de conférences, workshop, hackathon, séminaire, classe inversée, module d’enseignement à distance – qui peuvent d’ailleurs se combiner entre eux (il arrive fréquemment qu’une partie d’un atelier-laboratoire prenne la forme d’une classe partagée à l’international). C’est sans doute à travers cette plasticité (de nouveaux formats pouvant toujours voir le jour) que l’ambition transformatrice d’ArTeC se manifeste de la manière peut-être la plus sensible afin d’explorer, sous de multiples aspects, les chemins de la formation par la recherche. Transformer, c’est à la fois rendre différent, devenir autre et donner une autre forme. Faire émerger des apprentissages à la croisée des sciences et des arts, où les savoirs et les pratiques sont décloisonnés, c’est donc commencer par faire acte d’indiscipline. Expérimenter avec un esprit indisciplinaire : c’est par-là que peuvent naître les germes de la transformation. Manière aussi de faire, grâce aux MIP, l’éloge de l’impureté. Faire éclater les cadres habituels des cours. Situer sa démarche dans un champ disciplinaire pour mieux aller dialoguer avec d’autres disciplines, se confronter à elles et, pourquoi pas, les affronter pour mieux se laisser perturber et évoluer. Les mettre en question et les faire bouger en retour. Rompre la routine et la norme des cours récurrents – les trop fameuses, les trop inertes, 2 ou 3 heures par semaines, pendant 12 semaines…– pour façonner de nouvelles temporalités d’enseignement – plusieurs semaines en intensif, par exemple. Mêler, au coeur d’un même module d’enseignement, des « moments » conçus sur des registres différents (moments en présentiel/moments en distanciel ; moments de séminaires/moments de mises en pratique, etc.) amenés à se compléter au point de faire émerger entre eux des « zones d’indéfini ». Rendre possibles, autant que faire se peut, les délocalisations des enseignements et des élaborations artistiques, pour susciter des espaces réservés à la recherche et à la création, déconnectés des habitudes, douces ou pesantes, du quotidien. Avoir pour volonté de s’inscrire dans une dynamique « pratico-intellectuelle », où il s’agit de « faire pour comprendre et de comprendre pour faire », qui pourrait être une définition minimaliste de la recherche-création. Tisser des partenariats entre des universités, des écoles d’art et des institutions culturelles, pour façonner des projets nourris par des points de vue et des attentes complémentaires même, et surtout, s’ils sont contradictoires. Permettre effectivement le mélange d’apports de différentes disciplines et différents savoir faire en faisant travailler élèves et étudiant·es sur des projets à penser et réaliser. Inscrire, comme horizon de la conception de ces projets, fussent-ils encore balbutiants et esquissés, un moment de restitution et de valorisation pour un public et des regards extérieurs, qui relancent le travail, les questionnements et la recherche…
Voici, parmi bien d’autres possibles, des façons de valoriser l’indiscipline et de rendre l’expérimentation visible. Autant d’actions qui ont nourri, et qui nourrissent toujours, les Modules d’Innovation Pédagogique. Ce bilan en témoigne : une effervescence scientifique et créative, presque pétillante, y est à l’oeuvre. ArTeC a bien une dimension POP ! Il faut y voir une manière énergique, autant artistique que politique, de réagir aux effondrements qui menacent et aux dures réalités de l’époque. MIP ! MIP ! MIP !
Fabien Boully, directeur adjoint de l’EUR ArTeC